Le barrage de Belo Monte est un problème brésilien

Publié le par Monsieur Y

Au vu des nombreuses réactions que j'ai pu voir sur Internet concernant la polémique du barrage de Belo Monte, je m'apprête ici-même à probablement m'opposer à une grande quantité de mes camarades. Dès lors, si vous n'êtes pas prêts à lire ce qui va suivre, c'est-à-dire sans ouvrir votre esprit, alors passez votre chemin. Mais j'aimerais expliquer ici même pourquoi je m'oppose à une campagne mondiale contre ce barrage.

J'ai donc été informé de ce projet il y a peu de temps. En réalité, je viens d'apprendre que c'est un projet qui remonte il y a 20 ans. Je ne vais même pas discuter sur la pertinence du projet : il me paraît inhumain et même probablement inutile. Cela, c'est pour vous rassurer : comment ? Moi le défenseur de la Nature, des Indiens de l'Amazonie, moi l'opposant au productivisme acharné, je viendrais soutenir la construction d'un tel barrage ? Mais non voyons, c'est autre chose qui me dérange !

J'ai donc vu sur Facebook cette fameuse photo du chef Raoni pleurant quand il a appris que le barrage allait se construire :

 

http://www.libertero.net/wp-content/uploads/2011/06/RaoniLarme.jpg

 

Il est évident qu'on ne peut rester insensible à la détresse d'un homme qui s'est battu durant de longues années contre un projet inhumain. Mais je ne peux aussi que déplorer le traitement que l'on réserve à l'image. Comme pour les femmes afghanes, les "rebelles" lybiens, les manifestants syriens, ou autres opprimés de la Terre, l'être humain généreux est touché au plus profond de son coeur par le pouvoir de l'image. Voir un homme pleurer, surtout un Indien d'Amazonie, touche toujours énormément, et on se sent presque forcé de "vouloir faire quelque chose". En Afghanistan, en Lybie, en Syrie, on bombarde ou on voudra bombarder à coup de bombes; ici, on voudra bombarder à coup de pétitions. Désolé, mais je m'y refuse.

Comme par hasard, j'ai pu constater que de nombreuses personnes sur Facebook se sont joints à cette manifestation, mais je connais suffisamment ces personnes pour savoir que ce sont tout sauf des défenseurs des droits de l'homme, des anti-productivistes, des radicaux. Non, ce sont souvent des personnes qui sont aussi attirés par le gain et qui sont prêts à faire n'importe quoi pour gagner encore plus. Comme ce barrage est aussi une manière pour l'élite brésilienne de faire plus d'argent, je ne peux que retenir l'accusation d'hypocrisie. C'est encore une fois ce néo-colonialisme qui force les "civilisés" à vouloir dicter aux autres ce qui est bon et ce qui n'est pas bon. Nous, Européens, nous sommes pour l'écologie, et vous Brésiliens, vous n'avez rien compris, et nous devons vous apprendre à vous civiliser. Désolé, mais je ne mange pas de ce pain-là. Je suis férocement allergique aux leçons données par certaines personnes aux pays du Sud alors que dans les pays du Nord, nous n'acceptons pas les leçons du Sud. Prenons les choses autrement : si la Belgique décidait de construire une nouvelle centrale nucléaire, le gouvernement belge accepterait-il des critiques du peuple brésilien ? Dès lors, pourquoi, nous, "Européens civilisés", nous devrions nous interférer dans ce que fait le gouvernement brésilien ? Il me semble avoir lu que les puissances euro-américaines voulaient mondialiser la forêt amazonienne sous prétexte que les Brésiliens ne savent pas s'en occuper. La belle affaire ! On a vu ce que cela a donné au Proche-Orient. Le Brésil n'aura plus sa souveraineté sur son territoire et les multi-nationales euro-américaines pourront dépecer cette forêt.

Je sais aussi très bien que j'ai nombre de mes amis qui sont opposés à ce projet et qui aimeraient bien aussi "faire quelque chose". Je sais très bien que leur fond est bon, et comme eux je déplore ce qui va être fait. Mais je ne pense pas que se joindre à cette campagne est une bonne chose. Alors, chaque citoyen de chaque pays pourra venir s'opposer à n'importe quel projet de n'importe quel pays sous prétexte des "Droits de l'Homme". Le "Droit-de-l'hommisme", cela me gonfle prodigieusement, et on sait où cela mène.

J'ai pu voir qu'un fort mouvement s'était constitué au Brésil contre ce projet. C'est très bien. Les Brésiliens sont suffisamment grands pour savoir ce qu'ils ont à faire. J'espère qu'ils pourront arrêter cette folie, et qu'ils apprendront eux-mêmes que préserver la Nature est important. C'est comme la démocratie ou la justice sociale, cela ne s'impose pas de l'extérieur. Vous m'excuserez donc si je ne signe aucun document contre ce projet car j'estime que c'est un problème interne au Brésil.

 

Publié dans Fuck the system

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